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Photo du rédacteurMuriel Grauer

Détecter les signes avant-coureurs avant de s’enliser dans des pathologies chroniques

Dernière mise à jour : 31 janv.



Trop souvent, les animaux qui me sont présentés en consultation ont un historique médical déjà très long. De multiples thérapies ont été mises en place, ils sont épuisés. On me dit « vous êtes mon dernier espoir » ou encore « j’espère que vous pourrez faire un miracle ». Malheureusement, même avec beaucoup de bonne volonté, la médecine n’est pas de la magie.


Ce qui semble frappant, dans de nombreuses situations est que des signes discrets, à bas bruits, de dysfonctionnements ne sont, à ce stade, pas répertoriés. Ils sont passés sous le radar. Il faut attendre que les analyses sanguines et autres symptômes soient hors norme de manière « très visible » pour que l’on cherche la cause de cette altération d’une santé qui dérive pourtant parfois déjà depuis des années.


Pour le dire « cash » : quand des symptômes disparaissent sous traitement et qu’ils reviennent après, il est plus que probable que les véritables causes n’aient pas été identifiées.


Prenons par exemple ce chien qui parfois vomit, qui refuse tel ou tel aliment, il n’est capable de manger que lorsqu’il a réussi à évacuer son excès d’acidité en vomissant de la mousse blanche au réveil. On dit volontiers qu’il est capricieux, car il mange pourtant avec joie un bout de jambon, mais refuse ses croquettes. Heureusement, il réagit bien à des traitements ponctuels antivomitifs, ce qui est très rassurant pour le propriétaire. Toutefois, comme il rechute dès l’arrêt des médicaments proposés, on peut raisonnablement penser que la thérapie n’a traité que les symptômes.


Il faut alors creuser un peu, et souvent quand on creuse, on trouve ! Les gastrites, premières causes de vomissements chez les carnivores domestiques, sont généralement d’origine indéterminée. « Pourtant, parmi les sujets vomisseurs chroniques, Helicobacter est retrouvé dans l’estomac de 57 à 100 % des chats vomisseurs et de 74 à 90 % des chiens vomisseurs. En outre, l’éradication de ces bactéries entraîne une rémission des signes cliniques de la gastrite dans 93 % des cas » écrit Alexandre Balzer dans La Semaine Vétérinaire n° 1256:


On peut prendre pour autre exemple un chat obèse qui présente une mobilité diminuée, et des pathologies articulaires réglées ponctuellement par la prise d’anti-inflammatoires, mais qui reviennent invariablement dès l’arrêt des thérapies.


Citons ici la thèse de Marie-Sophie BOUCHARD sur la prise en charge de l’obésité : « L’obésité est associée à une augmentation de la morbidité et une mortalité précoce.[…] L’obésité, par l’hyperplasie du tissu adipeux, entraîne une augmentation de la production [de] cytokines pro-inflammatoires et donc une inflammation chronique (ZORAN, 2010). Cette inflammation, associée à une augmentation du stress oxydatif, joue un rôle important dans la pathogenèse des maladies chroniques associées à l’obésité ».


Régler le symptôme douloureux sans élucider la/les cause(s) du surpoids, revient à négliger l’origine du problème.


Ce sont, pour les deux situations, des anamnèses que je vois très régulièrement.


À ce stade, et même après une seule rechute, il me semble, en effet, très important d’investiguer pour avoir une réponse à la cause de ces vomissements ou de ces douleurs articulaires.


Il faut un diagnostic clair permettant d’éviter que d’autres organes (pancréas, foie, intestins,… ) ne soient impactés. On parle suivant les cas de gastroscopie, de biopsies, de prises de sang, radiographies,…


La sagesse voudrait que l’on soit sensible à ces signes discrets et que l’on prenne pour ce qu’elles sont ces manifestations de déséquilibre de la santé de l’animal.


Ne pas se contenter de faire disparaître des symptômes, mais de chercher la cause réelle permet d’assurer un équilibre global durable et d’éviter que des pathologies ne s’ancrent plus profondément.


Dans les stades où la maladie s’installe, la phytothérapie, l’alimentation et la micronutrition que j’emploie au quotidien sont de précieux et puissants alliés, mais, disons-le clairement, ils sont peu opérants face à un organisme déjà altéré par de longs mois d’errances thérapeutiques et d’alimentation inadaptées. À ce stade, ils ne peuvent plus faire l’effet attendu.


Alors, comment ne pas en arriver là, et comment détecter ces fameux symptômes précurseurs ?


En étant tout d’abord attentif à tout ce qui change : une perte de mobilité, un changement du comportement alimentaire, prise ou perte de poids, fréquence de mictions, de la qualité des selles, de vomissements, de mauvaises odeurs… etc


En plus de cette attention aux potentiels symptômes, une consultation annuelle lors de laquelle on passe en revue avec le vétérinaire la santé globale de l’animal est nécessaire. Une discussion de fond sur les différents aspects de la santé tels que la mobilité, les habitudes alimentaires, la digestion, l’endurance, le comportement général, la courbe de poids, le moral etc ….


L’objectif de ces consultations étant de repérer des signes avant-coureurs de pathologies plus sérieuses avant qu’elles n’apparaissent et de pouvoir aider l’organisme à rester en équilibre le plus longtemps possible.


Cette recherche demande du temps et une attention soutenue, une sorte de travail de détective afin de constituer un tableau complet, de faire le lien entre la qualité de l’alimentation, la capacité digestive individuelle et capacité de régénération. Il s’agit de pouvoir comparer les examens du jour avec des examens ou des observations antérieures pour pouvoir confirmer une tendance et d’être à même de réagir efficacement.


Anticiper, c’est être attentif aux signaux. On confond encore trop souvent médecine préventive et consultation vaccinale. On pense que le fait de remettre à jour le statut vaccinal de son animal est une sorte de vignette annuelle qui garantit la bonne santé. Cela ne suffit pas. Une vaccination raisonnée est importante, c’est un fait, mais la médecine préventive est évidemment beaucoup plus que cela. Et elle prend tout son sens lors de ces contrôles annuels complets où l’on explique l’enjeu que constitue la détection des signaux faibles.


« Les propriétaires d’animaux sont réellement engagés et prêts à s’investir dans les démarches de prévention. En 2014, dans une enquête menée dans un panel de 2 107 personnes, composé de 442 vétérinaires, 234 ASV(auxiliaire en soins vétérinaire) et 1 431 propriétaires de chiens (881) et de chats (540) concernant la médecine préventive, il ressort que les propriétaires sont prêts à s’investir fortement, y compris financièrement, pour maintenir leur animal en bonne santé, à partir du moment où ils ont compris les recommandations formulées par le vétérinaire » indique Ludovic FREYBURGER dans un article sur la médecin préventive.


Cette conscience des propriétaires d’animaux et de leurs vétérinaires est le meilleur rempart contre les maladies chroniques. À l’évidence, la maladie, une fois installée sera bien plus compliquée à gérer, le confort et le bien-être de l’animal sont impactés en premier, bien sûr, mais il s’agit aussi de coûts non-négligeables pour le propriétaire et de beaucoup de temps passé à organiser des visites chez des spécialistes et cliniques pour des hospitalisations.


D’un point de vue financier, il semble plus judicieux de répartir un peu mieux le « budget santé « sur toute la vie de l’animal, d’y inclure une alimentation qualitative, ainsi que des visites régulières, plutôt que de dépenser des sommes astronomiques lors de la dernière année de vie quand l’organisme est déjà massivement épuisé par des pathologies installées durablement.


Vieillir n’est pas une maladie, et vieillir en bonne santé devrait être un objectif à atteindre.

Un vieillissement réussi n’a rien à voir avec de la chance. Cela se prépare !

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